La question est simple :
pourquoi ce qui était possible depuis plus de vingt ans – publier un palmarès des hôpitaux à partir de leurs données d’activité – ne l’est-il plus ?
Comment se fait-il, alors qu’Emmanuel Macron lui-même prône l’accès plus fluide aux données numériques, clés de sa « start-up nation », que la censure puisse s’abattre ainsi ?
Plus largement, pourquoi l’accès aux données de santé est-il de plus en plus difficile, y compris pour les chercheurs ?
Source : Qui veut tuer le palmarès des hôpitaux ?
Qui veut tuer le palmarès des hôpitaux ?
ENQUÊTE. Chaque année depuis 2001, « Le Point » publie le palmarès des hôpitaux. L’accès aux données qui permettent sa réalisation vient d’être interdit.
Par Marc Payet
Temps de lecture : 15 min
La question est simple : pourquoi ce qui était possible depuis plus de vingt ans – publier un palmarès des hôpitaux à partir de leurs données d’activité – ne l’est-il plus ? Comment se fait-il, alors qu’Emmanuel Macron lui-même prône l’accès plus fluide aux données numériques, clés de sa « start-up nation », que la censure puisse s’abattre ainsi ? Plus largement, pourquoi l’accès aux données de santé est-il de plus en plus difficile, y compris pour les chercheurs ?
Il fallait donc enquêter pour savoir. Depuis mi-novembre, nous avons remonté l’ensemble de la chaîne d’autorisation administrative, en interrogeant de nombreux acteurs, afin de comprendre comment cette décision couperet a pu être prise. Vraie saga où se croisent des médecins bureaucrates du ministère de l’avenue de Ségur, très « règlement-règlement », un président des usagers de santé, Gérard Raymond, aux multiples casquettes, une jeune manager de la « health tech », Stéphanie Combes, tout feu tout flamme mais empêtrée dans ses protocoles, et un obséquieux magistrat de la Cnil (Commission nationale informatique et liberté), Louis Dutheillet de Lamothe.
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Une affaire politique. Rappelons que, pour réaliser ce classement depuis 2001, Le Point s’appuie sur le PMSI (Programme de médicalisation des systèmes d’information), gigantesque base de données contenant les dossiers médicaux anonymisés des 28 millions de patients hospitalisés chaque année dans les hôpitaux et les cliniques français. L’accès en est encadré par la Cnil, celle-ci ayant toujours donné un avis favorable à la transmission de ces données au Point. En 2020, elle précisait que la publication du palmarès annuel était un travail d’intérêt public. Mais depuis, la loi a été durcie, et un comité scientifique, le Cesrees (Comité éthique et scientifique pour les recherches, les études et les évaluations dans le domaine de la santé), a été chargé de donner un avis sur les méthodologies utilisées. Précision importante, les membres de ce comité sont nommés par arrêté ministériel.
Le Cesrees a beau se déclarer indépendant, il est entièrement à la main du ministère. Or, le 2 juin, il donnait un avis défavorable à la demande du Point, avis aussitôt entériné par la Cnil, qui n’était en rien obligée de le suivre. Une censure préalable que le ministre de la Santé, François Braun, taiseux depuis le début de cette affaire, a finalement commentée, à la suite de nos multiples demandes, par l’intermédiaire de la DGOS (direction générale de l’offre de soins), sans apporter d’éléments nouveaux. «Dans son avis du 2 juin, le Cesrees a jugé que la méthodologie utilisée pour établir le palmarès peut conduire à diffuser une information erronée sur les performances réelles des établissements de santé, pouvant ainsi induire en erreur les patients, et par conséquent être contraire à l’intérêt public. » Dit autrement, Le Point publie des fake news depuis vingt ans.

En réalité, l’affaire est politique. Le ministère est-il intervenu dans cette décision ? Le secrétaire général de la Cnil, Louis Dutheillet de Lamothe, nous apporte une partie de la réponse lorsqu’il nous reçoit au siège de la Cnil, le 19 décembre dernier, au 3, place de Fontenoy, à deux pas de l’Unesco : «Le ministère n’intervient pas. Mais il est vrai que notre instruction se fait avec l’avis du Cesrees. C’est la manière dont le ministère de la Santé participe à l’instruction. »« Ce type de décision, émanant d’un comité ministériel, remonte forcément au cabinet du ministre, et au ministre lui-même », estime Alain-Michel Ceretti, qui a longtemps fréquenté les arcanes du ministère de la Santé, au sein des associations de patients, dont il fut l’un des fondateurs lorsqu’il commença à lutter contre le drame des infections nosocomiales. « On parle quand même de l’interdiction de l’élaboration du palmarès du Point, une référence depuis vingt ans, c’est énorme, je suis stupéfait.» Et d’ajouter : « Le Point, à travers ce palmarès, a contribué au savoir. Je n’ai pas entendu le moindre responsable de centre hospitalier universitaire dire que ce n’était pas pertinent. Les tableaux sont issus du PMSI, c’est la réalité de l’activité hospitalière. Cette interdiction, de fait, est une faute politique lourde. Quand je me suis engagé dans le monde de la sécurité du soin, j’avais une phrase en tête : la transparence est le préalable à la qualité du soin. Ce qui avait créé l’insécurité, c’était le manque de transparence. Attention à ce retour en arrière, vers l’hôpital silence. » « Ce comité agit sur injonction du ministère de la Santé, c’est une décision politique. La Cnil n’aurait pas dû les suivre », estime le professeur Didier Sicard, qui a dirigé le Comité consultatif national d’éthique de 1999 à 2008, mais a aussi présidé à partir de 2006 le comité d’experts de l’Institut des données de santé. Frédéric Valletoux, député Horizons et apparentés et précédent président de la Fédération hospitalière de France (FHF), a été si étonné par cette censure qu’il a posé une question écrite au ministre de la Santé à l’Assemblée nationale, le 13 décembre 2022. « Ce classement des soins publics et privés existe depuis vingt-trois ans. Il est reconnu par les soignants, par la direction des établissements, et est perçu par la population comme une référence », écrit-il. Pour l’instant, aucune réponse du ministre. Cela n’étonne qu’à moitié un conseiller ministériel influent, en poste dans un autre cabinet : « Chez Braun, ils sont vraiment à la ramasse, pas réactifs, ça commence à faire beaucoup. Leur réponse sur la crise à l’hôpital n’est déjà pas brillante. Ne pas daigner répondre à une question écrite posée par un parlementaire depuis le 13 décembre, c’est dingue. » Interrogé, Frédéric Valletoux se demande si ce « niet » n’est pas lié à l’image d’excellence que renvoient les établissements cités dans le palmarès : «Ce classement donnait une vision positive du système de santé. Cela change de l’aspect misérabiliste qui est trop souvent renvoyé. A-t-on peur d’afficher une image trop favorable parce qu’elle insiste trop sur les bons élèves,l’élite, en décalage avec la souffrance des personnels, qui est par ailleurs réelle ? Si c’est le cas, c’est absurde, on confond tout. » Une hypothèse qui tient pourtant la route. Elle nous est confirmée par un actuel responsable d’un syndicat professionnel, ancien membre d’un cabinet ministériel à la Santé, qui confie sous le sceau de l’anonymat : « Si j’étais encore en poste au ministère, je me dirais que le classement peut orienter les patients vers les services d’excellence et contribuer à emboliser le système. Il peut provoquer un effet d’entonnoir. »
Stupéfaction. De fait, au sein du ministère de la Santé, nombreux sont ceux qui n’ont jamais accepté la publication de ce palmarès. « Il a été contesté à ses débuts car cela n’existait pas auparavant et il bousculait les habitudes, se souvient Gilles Johanet, ancien procureur général près la Cour des comptes et qui a dirigé à deux reprises la Caisse nationale de l’assurance-maladie. Cela irritait parfois, mais tout le monde le regardait. Puis il a fait son chemin, et la plupart des acteurs ont compris que c’était utile. Mais la pente naturelle de l’administration, c’est la mentalité de coffre-fort, qui consiste à garder ses données pour soi. Le ministre s’honorerait de réagir fortement sur ce sujet. À titre personnel, je demande le retour du palmarès du Point. »
Parmi les dizaines d’interlocuteurs que nous avons rencontrés, c’est la stupéfaction qui prédomine. À la Haute Autorité de santé (HAS), qui publie son propre baromètre des établissements de santé, le QualiScope, une source nous affirme que « le palmarès du Point jouait un rôle intéressant, et a contribué à la connaissance du public sur ce qui se passe à l’hôpital. Il est aberrant d’en interdire la réalisation ». Un ancien directeur de service de la HAS, passé dans une autre administration, est lui aussi outré : «On a eu des débats intellectuels avec l’équipe du Point. Mais c’était constructif. Interdire leur démarche est un grand recul pour la santé en France. Je suis interloqué. »
Les censeurs
Silence coupable
Le premier des censeurs se nomme Bernard Nordlinger. Ce professeur, qui a dirigé le service de chirurgie digestive de l’hôpital Ambroise-Paré à Boulogne-Billancourt, est le président du Cesrees. Il n’a pas souhaité répondre à nos questions. Cette assemblée d’experts en tout, dont le ministère a le secret, a été créée le 15 mai 2020, à la suite du durcissement des règles d’accès aux données de santé, entamé par la ministre socialiste Marisol Touraine en 2015 et poursuivi durant la période où Olivier Véran était en poste. La vingtaine de membres du Cesrees étant nommés par arrêté ministériel, aucun risque de tomber sur un lanceur d’alerte ou un rebelle ! Des médecins, des épidémiologistes dont beaucoup travaillent dans la sphère publique de la santé, et deux représentants des usagers, sur lesquels on croit pouvoir compter quand il s’agit d’informer les patients : Serge Hatchwell, délégué à la protection des données, représentant l’association Aides, et Lucie Vialard, chargée de mission pour l’Observatoire sociétal des cancers à la Ligue nationale contre le cancer. Si le représentant d’Aides ne donne pas suite à nos demandes, Lucie Vialard nous renvoie vers Gérard Raymond, le président de France Assos Santé, qui regroupe toutes les associations de patients, 72 au total. Celui-ci occupe un autre poste stratégique, puisqu’il est également vice-président du Health Data Hub, structure créée en 2019 et chargée d’héberger toutes les bases des données de santé et d’instruire les dossiers de demande à travers le Cesrees, dont le Health Data Hub assure le secrétariat. Pour savoir ce qui s’est passé, il faut donc parler avec Gérard Raymond, un homme clé dans cette affaire.
Les multiples casquettes de Gérard Raymond
Avec sa voix rocailleuse, de l’Ariège, « Gérard » est un personnage dans le domaine des associations de santé. Atteint de diabète, il a d’abord milité au sein de la Fédération française des diabétiques, qu’il a présidée de 2015 à 2019. « Gérard », âgé aujourd’hui de 72 ans, a gravi les échelons, siégeant dans d’innombrables commissions au nom des usagers, au sein du ministère de la Santé. Jusqu’à perdre une partie de son indépendance vis-à-vis de la tutelle ? Un membre des usagers, anonymement, le tacle sévèrement : « Gérard est un homme gentil, sympa, pétri de reconnaissance. Le fait de côtoyer des gens de la haute lui a fait croire qu’il en est. Et il n’a plus de regard critique. Tout le monde l’appelle “monsieur le président”… » Une scène dit tout. « Gérard », le 29 août 2022, a reçu sa médaille de chevalier de la Légion d’honneur, chez lui, à Saint-Girons, dans l’Ariège, des mains de Nicolas Revel, actuel directeur général de l’AP-HP (Assistance publique-Hôpitaux de Paris), ex-patron de l’Assurance maladie et ancien directeur de cabinet du Premier ministre Jean Castex, qui avait fait le déplacement. Le directeur général de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des représentants des syndicats de professionnels de santé étaient eux aussi présents pour saluer « Gérard. » L’intéressé jubilait ce jour-là : « C’est un grand moment de retrouvailles avec des personnes qui ont essayé de faire progresser le système de santé », rapporte La Dépêche. Mais, en tant que vice-président du Health Data Hub, « Gérard » n’est plus seulement un associatif. Le paisible bénévole se retrouve à copiloter une structure énorme de 80 millions d’euros de budget annuel. Est-il un alibi du pouvoir, pas fâché de mettre en avant « leur » usager de santé ? En tout cas, « Gérard » – qui siège aussi au Conseil économique, social et environnemental – n’est pas un allié du palmarès. Quand nous le joignons au téléphone ce 23 novembre 2022, il commence par se faire patelin, bonhomme, puis change de ton et s’emporte sur « l’affaire » et l’accusation de « censure ». « La liberté d’accès aux données de santé, ce n’est pas la chienlit ! Il faut des règles. La Cnil et le Cesrees ont dit qu’il pouvait y avoir des biais dans l’élaboration de leur palmarès. Ils se sont fait recaler, où est le problème ? » On lui objecte qu’un des meilleurs experts du système de santé, Jean de Kervasdoué, père du PMSI, qu’il a mis en place en tant que directeur des hôpitaux, a défendu en détail dans un article la méthodologie du Point, qualifiant de « très discutables » les arguments du Cesrees. Un ange passe. Seul commentaire : « Oui. Eh bien, ça, c’est juste l’avis de Jean de Kervasdoué. »
Ne s’agissait-il pas ni plus ni moins de régler son compte à ce palmarès ? On peut le croire à la lecture du communiqué de France Assos Santé du 23 novembre, qui affirme clairement y être opposé. « Au-delà d’un palmarès, les usagers de la santé aujourd’hui, ainsi que tous les acteurs, veulent une évaluation claire et pertinente de notre système de santé, fondée sur des données de qualité et sécurisées. » Et le communiqué de citer en référence la Haute Autorité de santé et sa « cartographie QualiScope », basée sur des « données réelles d’activité ». Comme si le palmarès du Point lui faisait de l’ombre. Au sein de la HAS, une source est interloquée : « D’habitude, les représentants des usagers ont toujours dénigré notre QualiScope ; là, c’est une première ! Mais on ne comprend pas ce qu’ils reprochent au palmarès des hôpitaux du Point. Il avait peut-être des petits défauts, mais permettait de nous challenger. C’était un vrai plus. » Le communiqué a créé des remous au sein même des usagers de santé. Claude Rambaud, présidente de l’association Le Lien et vice-présidente de France Assos Santé, ne cache pas son malaise : « C’est vrai que ce texte est un peu confus. Mais c’est à replacer dans un contexte plus large. L’accès aux données de santé est vraiment compliqué en ce moment. »
Louis Dutheillet de Lamothe, secrétaire général de la Cnil, tente de se justifier
L’autre instance qui a choisi de couler le palmarès, c’est la Commission nationale de l’informatique et des libertés. 225 fonctionnaires y traitent de dossiers qui concernent l’accès à toutes sortes de données. Son secrétaire général, Louis Dutheillet de Lamothe, regrette que ce dossier lui « prenne beaucoup de son temps » avec des « dizaines de réunions sur le sujet depuis des mois ». Et même des articles de presse à gérer… En préambule, il tient à rappeler que « beaucoup de cette affaire se joue autour de la récente modification du cadre légal. Le législateur a décidé alors que l’accès aux données de santé le serait en fonction des autorisations données par le Cesrees. Il est plus restrictif. » Il s’irrite toutefois quand on lui fait remarquer que cette autorisation était pourtant donnée au Point… par la Cnil depuis vingt ans. « Il y a eu deux avis du Cesrees. Très motivés. Ils ont convaincu le collège. » Un peu ébranlé par la démonstration et les critiques de Jean de Kervasdoué sur les motivations du comité, Louis Dutheillet de Lamothe assure que la Cnil n’a pas obéi aux ordres du ministère. « Nous ne sommes pas une chambre d’enregistrement de ce comité. » Sans doute, mais la Cnil n’était pas obligée de suivre l’avis du Cesrees.
Au sein du collège des commissaires de la Cnil, un autre personnage a joué un rôle important dans ce dossier. Il s’agit de la rapportrice, Valérie Peugeot, 59 ans, qui suit la problématique des données de santé. Son parcours est original. Diplômée de Sciences Po, elle a été l’assistante parlementaire du député européen PS Michel Hervé entre 1989 et 1994, mais elle est aussi une des cofondatrices d’Attac (organisation altermondialiste de gauche radicale, qui milite pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne). Bref, ce n’est pas une fanatique de l’évaluation hospitalière et de la mise en valeur des meilleurs établissements. Consacrée « militante citoyenne » par Le Monde le 12 novembre 2001, elle rejoint en 2005 Orange Labs au sein du département de sciences sociales et humaines du principal opérateur numérique français, pour lequel elle continue de travailler en plus de son poste à la Cnil de commissaire chargée du secteur santé. Nous avons demandé à la Cnil de pouvoir parler à Valérie Peugeot, mais cette autorisation n’a pas été accordée. « Mme Peugeot a présenté le dossier et a ensuite donné son avis aux commissaires, mais je ne peux pas vous dire ce qu’elle a dit, c’est confidentiel », indique Louis Dutheillet de Lamothe. Mais son avis est important, non ? lui suggère-t-on. Il opine : « L’avis de la rapportrice est important, évidemment. Mais ce n’est pas la décision de Mme Peugeot, c’est la décision du collège », insiste-t-il, comme s’il fallait dissiper un malentendu.
« Jean-François, “do you have” des news de votre Cnil ? »
Plusieurs professionnels rencontrés au cours de notre enquête témoignent eux aussi des « blocages » de la Cnil. Parmi eux, le professeur de médecine Jean-François Bergmann, de l’hôpital Lariboisière à Paris, raconte cette anecdote : « Un de mes collègues, cancérologue américain, aime me charrier quand je le croise dans des congrès, en me disant dans un éclat de rire : “Jean-François, do you have des news de votre Cnil ?” » Une référence au retard pris par l’organisme de contrôle français pour donner une réponse au chercheur français. « J’étais pourtant le coordonnateur d’une vaste étude internationale sur la thrombose [Endorse, dont les résultats sont parus dans The Lancet en 2008]. Mais figurez-vous que tous les autres pays, dont les États-Unis, ont eu leur autorisation, avant la France, bonne dernière ! » Le Pr Bergmann n’en revient pas. « La Cnil fait de la méthodologie en médecine à la place de ceux qui devraient en faire, c’est-à-dire les médecins-chercheurs. Un bureau m’a rétorqué que je n’y connaissais rien en thrombose ! » Il a aussi un autre exemple en tête : « Quand j’étais dans les instances de l’AP-HP, on avait voulu créer un entrepôt de santé. C’était atrocement compliqué en raison de tous ces bâtons administrativo-juridiques que l’on nous mettait dans les roues. Si j’étais ministre de la Santé, je supprimerais le rôle de la Cnil dans le domaine de la recherche en santé. C’est l’exemple même de la frilosité française. En réalité, c’est un moyen bien pratique pour ne pas partager ses données. » Il se déclare lui aussi « solidaire du Point » : « Le classement est critiquable, comme tout classement, mais c’est une évaluation saine. Laissons-les faire leur boulot, comme ils le font depuis vingt ans. »
Le Health Data Hub est hébergé par… Microsoft
Cette censure s’inscrit donc aussi dans une perspective plus large, celle du difficile accès aux données de santé pour l’ensemble des acteurs. « La chaîne administrative d’autorisation fonctionne mal, c’est de pire en pire », constate Claude Rambaud. Il faut dire que le Health Data Hub, la plateforme qui accueille la plupart des grandes bases informatiques, dirigée par Stéphanie Combes, polytechnicienne énergique, a connu bien des déboires dont le fait d’avoir choisi Microsoft comme hébergeur. Au risque que nos données s’envolent outre-Atlantique, comme l’a signalé le Conseil d’État. Le Health Data Hub a bien tenté de trouver un opérateur européen, mais pour l’instant cela n’a pas abouti. Après avoir déposé un dossier de demande de « copie » des bases à la Cnil, le Health Data Hub l’a donc finalement retiré de peur de se faire retoquer. Tout cela n’empêche pas ses responsables d’avoir de l’ambition. Le 21 décembre, comme si de rien n’était, Stéphanie Combes et Gérard Raymond déclaraient dans un communiqué que « les prochains projets de la nouvelle feuille de route répondront à une demande renouvelée et croissante d’un accès plus rapide et facilité des données de santé et de fairede l’ouverture des données une norme ». La norme, pour l’instant est plutôt le verrouillage à double tour. Et il y avait peut-être plus urgent à régler que de s’en prendre au palmarès du Point !§
Réactions

« Le ministre s’honorerait de réagir fortement sur ce sujet. À titre personnel, je demande le retour du palmarès du “Point”. »
Gilles Johanet

« Cette interdiction est une faute politique lourde. »
Alain-Michel Ceretti

« Ce classement donne une vision positive du système de santé. Cela change de l’aspect misérabiliste trop souvent renvoyé. »
Frédéric Valletoux

« L’accès aux données de santé est vraiment compliqué en ce moment. »
Claude Rambaud

« Si j’étais ministre, je supprimerais le rôle de la Cnil dans le domaine de la recherche en santé. »
Jean-François Bergmann
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