Le volet occulté du plan de sauvetage d’Air France | Mediapart

Benjamin Smith © Cagatiocommons

Benjamin Smith © Cagatiocommons

Dans ce document, on découvre donc que Benjamin Smith bénéficie d’une rémunération fixe de 900 000 euros par an. Pour mémoire, c’est le double de la rémunération autorisée pour le PDG d’une entreprise publique. C’est donc cette rémunération qui va baisser de 25 %, pour atteindre 675 000 euros par an. Encore faut-il souligner que cet engagement pris par le patron d’Air France vaut « pendant la crise liée au Covid-19 » et non pas pour l’ensemble de l’année 2020. Ce qui peut suggérer que l’habile patron ne perdra que quelques dizaines de milliers d’euros, s’il estime que la crise prend fin le 11 mai, avec le déconfinement. Il n’est pas illogique de le penser puisque plusieurs patrons du CAC 40 ont annoncé une baisse de leur rémunération fixe pour… deux mois seulement ! Le même document précise ensuite que « le montant de la rémunération variable annuelle de M. Benjamin Smith en sa qualité de directeur général a, sur proposition du Comité de rémunération, été arrêté à 768 456 euros par le Conseil d’administration lors de sa réunion du 19 février 2020 ». C’est donc à cette rémunération variable que renonce Benjamin Smith, et dans ce cas, il n’y a pas d’ambiguïté : il précise bien que son renoncement vaut pour l’intégralité de sa somme due « au titre de l’exercice 2020 ». Mais le patron d’Air-France-KLM – et toute l’astuce est là – profite d’un autre bonus, négocié lors de son arrivée. Et de celui-là, il n’a pas parlé, alors qu’il est autrement plus considérable que celui auquel il a renoncé. Il suffit de se reporter à la page 100 du document. On y a apprend que l’intéressé est bénéficiaire chaque année pendant trois ans de deux plans d’attribution de bonus, payables à la fin de ces trois ans. Il y a d’abord le « Plan long-terme (Phantom shares) » : « Attribution de 110 253 unités de performance, payables en 2022 sous réserve d’une condition de présence de trois ans, et sous conditions de performance. Leur paiement en 2022 (sous réserve de la condition de présence et des conditions de performance) sera calculé par rapport au cours de Bourse après l’annonce des résultats de l’exercice 2021 ». Et puis, il y a le « Plan spécifique long-terme » : « Attribution de 110 253 unités de performance, payables en actions Air France-KLM (une unité de performance donnant droit à une action) en 2022 sous réserve d’une condition de présence de trois ans, et sous conditions de performance ». Et le même document précise que les « 220 506 unités de performance » que perçoit chaque année Benjamin Smith sont « valorisées à 2 000 000 € et calculées par rapport au cours de Bourse d’ouverture de l’action Air France-KLM au 17 août 2018 ». Alors que la compagnie serait en faillite si l’État ne volait pas à son secours, le patron, lui, va donc continuer de faire fortune pendant la crise. Et cela, le ministère des finances le sait pertinemment, puisque le conseil d’administration du groupe est truffé d’oligarques du ministère des finances. La présidente du très généreux comité des rémunérations est ainsi Isabelle Bouillot, qui fut directrice du budget à Bercy. Il y a aussi Jean-Dominique Comolli, qui fut directeur de cabinet du ministre du budget.

Source : Le volet occulté du plan de sauvetage d’Air France | Mediapart

Share this nice post:

Comments Closed